lundi 25 novembre 2013

Pietra Viva de Leonor de Récondo.

Salut les lapins,

Aujourd'hui:

Pietra Viva de Leonor de Récondo.

Michelangelo, en ce printemps 1505, quitte Rome bouleversé. Il vient de découvrir sans vie le corps d’Andrea, le jeune moine dont la beauté lumineuse le fascinait. Il part choisir à Carrare les marbres du tombeau que le pape Jules II lui a commandé. Pendant six mois, cet artiste de trente ans déjà, à qui sa pietà a valu gloire et renommée, va vivre au rythme de la carrière, sélectionnant les meilleurs blocs, les négociant, organisant leur transport. Sa capacité à discerner la moindre veine dans la montagne a tôt fait de lui gagner la confiance des tailleurs de pierre.
Lors de ses soirées solitaires à l’auberge, avec pour seule compagnie le petit livre de Pétrarque que lui a offert Lorenzo de Medici et la bible d’Andrea, il ne cesse d’interroger le mystère de la mort du moine, tout à son désir impétueux de capturer dans la pierre sa beauté terrestre.
Au fil des jours, le sculpteur arrogant et tourmenté, que rien ne doit détourner de son œuvre, se laisse pourtant approcher : par ses compagnons les carriers, par la folie douce de Cavallino, mais aussi par Michele, un enfant de six ans dont la mère vient de mourir. La naïveté et l’affection du petit garçon feront resurgir les souvenirs les plus enfouis de Michelangelo.
Parce qu’enfin il s’abandonne à ses émotions, son séjour à Carrare, au cœur d’une nature exubérante, va marquer une transformation profonde dans son œuvre. Il retrouvera désormais ceux qu’il a aimés dans la matière vive du marbre.
Michelangelo a 30 ans quand Andrea, l'homme qu'il admire secrètement depuis 13 ans, meurt dans le couvent où il exécute ses dissections. Il décide de partir et de se rendre à Carrare pour y acheter le marbre nécessaire à la réalisation du tombeau de Jules II et pour oublier, tout simplement. Mais l'oubli n'est pas une chose aisée et les souvenirs refont surface, douloureux et lancinants.

Éloigne ton corps du mien. Éloigne tes doigts des miens. Et qu'avec toi s'en aillent les souvenirs de ta peau que je n'ai jamais touchée, que je n'ai fait que parcourir du regard sur le marbre. Andrea, tu es la beauté que je ne saurai jamais atteindre avec mon ciseau. Tu es la preuve de la supériorité de la nature sur mon art.

Peu de mots peuvent décrire correctement ce livre. J'en ressors complètement bouleversée et pleine d'émotions. J'ai tourné encore et encore les pages en me retenant de pleurer. C'était juste.. Beau, magnifique. Une véritable œuvre d'art, description qui convient tout particulièrement à ce roman qui parle d'un homme qui a laissé une trace immuable de son passage à l'aide de ses mains talentueuses. Je ne sais pas ce qu'il y a de particulier. L'écriture est douce et légère mais surtout incroyablement touchante. Ce sont des sentiments bruts et mélancoliques, les sentiments d'un homme triste qui a perdu ses souvenirs et ceux qu'il aime.

Sa nourrice portait en elle assez d'amour pour lui faire croire qu'il n'avait rien à craindre et que, si cette voie-là était la sienne, il ne fallait pas la laisser s'échapper. Pour cela, il devait accomplir une chose: oublier les autres et plonger en lui-même. Elle avait employé ces termes. Et quand, la tête la première, il plongea dans son magma intérieur, il s'aperçut que sa chair était faite de pierre vive. De pietra viva.

Michelangelo a perdu l'homme qu'il admirait mais également l'image de sa mère. Disparue lorsqu'il avait six ans, le petit bonhomme qu'il était a préféré enterrer les moments passés ensemble pour ne pas souffrir. Les effluves de son parfum lui reviennent doucement grâce à la présence lumineuse de Michele, un petit garçon qui a lui aussi perdu sa mère il y a peu. Une fraîcheur l'entoure, une fraîcheur qui réveille des parcelles de son passé. 

"Quelques jours après la mort de maman, je me suis retrouvé seul avec papa dans la maison. Il était assis près de la cheminée, la tête entre ses mains. Je croyais qu'il s'était endormi. Je me suis approché et je lui ai tapoté l'épaule. Quand il m'a regardé, j'ai vu qu'en fait il pleurait. Il s'est alors mis à genoux et a éclaté en sanglots dans mes bras. Comme un enfant. Tu vois, l'enfant, c'est lui maintenant! Tu comprends?
- Je comprends bien.
- Comment te dire exactement? C'était comme si j'enlevais ma petite veste en peau de mouton pour ne plus jamais la remettre. Tu comprends? 
- Je comprends bien.
- Tu dis que tu détestes les enfants, mais moi je n'en suis plus un!" 
Michelangelo caresse la chevelure de Michele et lui répond:
"J'ai eu une veste comme la tienne et je peux te dire qu'une fois qu'on l'a perdue, on ne la remet plus jamais."

C'est l'histoire d'une recherche et d'un passé. C'est triste mais tellement beau que j'en suis juste encore complètement retournée. J'ai du mal à décrire sa beauté car parfois il n'y a pas de mots pour la décrire, seulement ce qu'on ressent face à elle et je dois avouer que je suis rarement bouche bée comme maintenant. J'ai eu le coeur serré tellement de fois et j'en suis pourtant ressortie les larmes aux yeux mais le sourire aux lèvres. J'ai aimé et j'ai admiré, j'ai redécouvert et réappris, j'ai senti et touché. Des mots purs et d'une simplicité étonnante qui permettent une plongée rare et vous retournent le coeur.

Pietra Viva est un roman à découvrir. On se laisse emporter à Carrare sur les traces d'un artiste seul et blessé par la vie, un être qui devra réapprendre à vivre sans se laisser emporter par son passé. Une leçon de vie, un tableau magnifique et émouvant au possible.

Merci à Price Minister pour l'organisation des Matchs de la rentrée littéraire qui m'a permis de lire ce roman incroyable,


Des bisous!

1 commentaire:

  1. Personnellement, ce livre ne m'a pas émue, mais...quelle beauté, effectivement. J'étais admirative de la prose de Léonor de Récondo, il y'a quelque chose de magnifique dans son écriture. Il est difficile de décrire ce roman et de le caser dans une catégorie littéraire...ce n'est pas totalement un roman historique, malgré la trame, c'est bien plus que cela. Un beau moment de lecture.

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